Jeux de construction

Présenté de la façon la plus libre qui soit, ce travail repose sur l'intersection de formes complémentaires entrevue au chapitre 05. Comment mêler librement toutes les notions abordées lors des premiers exercices, en ajoutant ce paramètre ?
Selon le vieil adage stipulant que le tout est davantage que la somme de ses parties, prendre deux volumes indépendants et chercher à les emboîter ouvre à toutes sortes d'explorations formelles, sans perdre de vue la notion de jeu, encore et toujours.

Ces intersections soulèvent en effet un certain nombre de difficultés :

Vous pouvez laisser leurs arêtes vives, sortantes ou rentrantes. Ce parti, qui renvoie aux drapés et dérivés (voir chapitre 10 « drapés »), permet les contrastes d'ombres et de lumières, sans percer le moindre trou.

01 & 02. Pauline BOYER & Léa HAOUZI

Vos arêtes peuvent être abattues sortantes avec un « chanfrein » ou abattues rentrantes avec un « congé » c'est-à-dire un léger remplissage de cette intersection. Dans ces deux cas, il s'agit d'adoucir la transition d'un plan à l'autre.

03 & 04. Nicolas OSSORGUINE & Gabriel LAURILLOU

Remarquez que si deux plans se rencontrent avec un angle très ouvert, le passage progressif de l'un à l'autre tend à faire disparaître cette séparation. Les sculpteurs appellent cela faire « mourir » une limite de plan. Le design automobile use très largement de ce processus.

05. Nicolas OSSORGUINE

Vous pouvez utiliser une « pige » pour changer d'échelle d'observation :
le simple fait de poser une petite pastille de terre dans une maquette permet de se projeter mentalement à l'échelle de cette pastille comme s'il s'agissait d'un personnage dans une maquette d'architecture, ainsi vous changez radicalement la perception que vous avez des formes que vous venez de modeler. De petite esquisse votre projet prend une dimension monumentale !

06 & 07. Pauline BOYER & Camille JACQUEMIN

Choisissez de travailler les rythmes à partir d'une forme simple, le triangle par exemple. Surface orientée par excellence (l'oeil regarde toujours vers la pointe la plus fine), elle se prête aisément à toutes sortes de combinaisons, intersections mais aussi déformations. En jouant avec ces paramètres simples, la sculpture s'élabore d'elle-même, offrant tantôt un volume fermé, tantôt des formes plus ouvertes, selon le sens de lecture.
Par la multiplicité des points de vue, une forme peut revêtir à la fois une signification et son contraire (ouvert/fermé, clair/obscur, lisse/granuleux...). Par exemple, les célèbres Chevaux de Marly éclatent dans l'espace de face, mais s'inscrivent de profil dans une mandorle fermée.
Les chapitres suivants approfondiront cette notion.

08, 09 & 10. Camille JACQUEMIN

Toutes ces notions fondamentales se retrouvent dans la sculpture au sens le plus large, et sous des formes diverses se retrouveront dans les chapitres suivants. Toutes les sculptures que le passé nous a laissées à l'état d'ébauche ne sont que géométries. Vous confronter à ces problèmes formels ne se limite pas à vous permettre de créer des volumes qui vous seront personnels : quand vous regarderez les sculptures des autres, vous en apprécierez la structure intime, la science du modelé.

Les volumes simples constituent depuis toujours le moyen privilégié de se familiariser avec cette grammaire des formes, sans exclure l'auto-organisation (voir chap. 12 et 16), dont on sait qu'elle constitue l'un des moyens inventés par la Nature pour développer des organismes complexes.