On peut étendre à la sculpture la remarque de Goethe : « Ce que je n'ai pas dessiné, je ne l'ai pas vu » et remettre à l'honneur la discipline consistant à copier les maîtres, en tant qu'éducation de l'œil.
J'ai beau tous les ans mettre en garde verbalement mes étudiants sur les erreurs qu'il vont faire, leur expliquer l'opposition franche concave/convexe qui caractérise ce merveilleux fragment provenant de l'embase de l'allégorie de l'Eglise, sur la façade ouest de Notre Dame de Paris, eh bien, cela ne sert à rien. Plus exactement, mes explications ne quittent l'abstraction du langage qu'à partir du moment où, sans avoir besoin de prononcer un mot, je prends les outils pour corriger ce qui doit l'être.
La sculpture est bien un autre langage, qui forge l'esprit à sa façon : dans l'espace.
Réalisés par les élèves de Mise à Niveau de mon collègue Marc Lopez-Bernal, il s'agissait de transposer en bas-relief des feuilles de géranium, ce qui constitue la meilleur introduction possible à la sculpture ornementale (d'autres plantes conviendraient).
La nature offrant toujours bien des chemins de lecture, le naturaliste ne regardera pas ces feuillages comme le peintre, qui ne les verra pas non plus comme le sculpteur.
Pas à pas :
Voici le mode opératoire pour faire un bas-relief :
recouvrez la planche de travail d'une semelle de terre ;
choisissez un cadrage ;
ébauchez au couteau sur cette semelle votre dessin ;
suivez votre dessin avec des boudins roulés pour les tiges et des plaques de glaise pour les feuilles ;
Vous pouvez préparer les feuilles séparément, puis les « coller » au fond comme l'exemple ci-dessous. Pour lier les reliefs et les fonds en un ensemble solide et cohérent, il faudrait rajouter des épaisseurs par ajouts de matière (voir chapitre 11 « concave/convexe » cluzet) en veillant à mettre en correspondance les points les plus hauts. Pour l'instant, il manque l'impression de densité propre à cette technique, c'est-à-dire l'appartenance au mur. La seconde correction possible passe par une manipulation déplaisante pour l'étudiant : on prend la planche, on l'écrase face contre le sol puis on la repose sur la sellette. (voir chapitre 17 « médaillon » bichon 5). Le plan obtenu devient l'équivalent du mur dans lequel le sculpteur ornemaniste doit inscrire ses motifs.
Vous pouvez créer de beaux effets d'ombres et de lumières, mais veillez à ce que les reliefs ne soient pas trop importants et les tiges trop grêles comme dans l'exemple ci-dessous ;
Les propositions ci-dessous présentent une bonne résolution des problèmes soulevés : chaque feuille possède son épaisseur propre et sa dynamique, sans quitter le lien avec le fond qui caractérise le bas-relief.