S'il y a une constante dans la sculpture mondiale toutes époques confondues, c'est bien l'utilisation du drapé. Tantôt austère (la robe de l'Aurige de Delphes) tantôt baroque avec Phidias, frisant l'abstraction géométrique en Chine avec les Song ou préfigurant l'Art Nouveau avec les arabesques d'Agostino di Duccio, en passant par la magistrale plénitude des pleurants de Klaus Sluter, ou l'expressionnisme des plis de la Vierge de Douleur de Germain Pilon.
Avant d'être en mesure de l'inventer, il importe de le copier pour mieux en comprendre les mécanismes. En effet, copier une forme que l'on a devant soi, ce n'est pas tenter de la reproduire servilement, mais toujours, et quelle qu'en soit la nature, la reconstruire en passant par l'analyse.
Pas à pas :
Ici l'on a pris un drap assez grossier, offrant des plis aux directions bien franches et plutôt rectilignes, posé sur une caisse.
N'importe quel autre support conviendrait, mais veillez à ne pas plier le tissu après l'avoir repassé.
TS2 Céramique (2010)
Pratiquement, il n'est pas nécessaire de s'appuyer sur un support. Si les plis verticaux dominent, ils seront leur propre armature. De simples boudins de terre assemblés, accolés, ajoutés les uns aux autres feront l'affaire. Vous pouvez toujours leur adjoindre des entretoises par derrière.
Analysez d'abord les épaisseurs, les directions, les proportions des axes principaux.
Ce sont là encore des formes géométriques simples qu'il importe de composer entre elles.
Puis, l'architecture des formes étant posée, intéressez vous à la nature des arrondis, à la façon dont ils se pincent aux changements de directions, ou dont ils s'épaississent.
Il faut d'abord construire les plans, puis seulement après établir les passages (voir : le traitement des angles, sortants ou rentrants, vu au chapitre 07) en adoucissant les transitions.
Marie GUERRIER, Aurian RIETHMULLER
Cet exercice vous permettra d'affiner votre perception des profondeurs. En effet, si le dessin dominant se manifeste par un jeu d'obliques plus ou moins enchevêtrées, suivant les directions des plis (hauteur et largeur), il vous faudra prendre aussi en compte un élément plus discret, lié à la perception que l'on a des surfaces, selon le sens de leur arrondi (profondeur).
Je m'explique : posez une feuille de papier sur une table en verre. Que vous la regardiez d'un côté ou de l'autre, rien ne change. Mais mettez-là en équilibre par son milieu sur une règle : ses bords tombent, et c'est comme si la règle poussait l'arrondi de la feuille vers vous.
Vu d'en dessous, côté concave, il s'éloigne au contraire. (voir chapitre 19).
Eh bien c'est ainsi que l'on perçoit les formes. D'une planéité statique vers la dynamique des courbes, mais toujours dans le sens de leur flèche. Si les plis sortants dominent, alors leur résultante suggérera la phase active d'une respiration, le moment où les formes se dilatent, poussent vers l'extérieur. Ainsi Sluter et ses continuateurs ont traité la bure des sublimes pleurants des tombeaux des Ducs de Bourgogne : les courbes sont tellement sortantes qu'elles s'appuient les unes sur les autres, ne laissant pas de place aux concavités.
Lil SIRE
Au contraire, des plis concaves dominants imposeront une impression d'effondrement potentielle. Comme les drapés avachis des gisants d'Henri II et Catherine de Médicis, par Germain Pilon, symbolisent la mort en opposition avec les puissantes convexités des corps, saisis juste avant l'ultime soupir.
Aurian RIETHMULLER
Enfin, par jeu toujours, la table est mise en un changement d'échelle amusant.